Entretien avec will alexander par Giorgia Pavlidou et Mohsen Elbelasy

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Entretien avec will alexander par Giorgia Pavlidou et Mohsen Elbelasy

Translated by Pierre Petiot

1. Comment décririez-vous la différence entre le surréalisme de poètes comme René Daumal, Roger Gilbert-Lecomte + d’autres du Grand Jeu et le groupe organisé autour d’André Breton ?

1 . Nous avons la plus grande partie du siècle pour examiner cette dynamique avec le recul nécessaire. Dans ce contexte, le temps n’est pas une abstraction où l’on peut composer une opinion via un luxe théorique. Les circonstances semblaient définir les tendances. Il semblait que Breton était résolument orienté autour de la question de la société et de ses fractures tandis que Daumal, Lecomte et Le Grand Jeu étaient plus axés sur les compétences et les comportements évolutifs qui semblaient moins enclins au théâtral et au visible. Les tensions entre les deux forces empêchaient une synthèse entre les deux parties et la tendance extérieure qui était la sphère de Breton avec ses proclamations grandioses mais insidieuses ne pouvait jamais trouver de support dans la praxis intérieure qu’était Le Grand Jeu. Je ne veux pas regarder leurs tendances exclusives avec une sorte de recul idéologique, mais à travers ce que je considère être ma tendance poétique individuelle qui n’est jamais imprégnée ou dynamisée par ce que j’oserai appeler l’idéologie théorique. Mais quant à ces deux dynamiques, il me semble que je suis organiquement allumé par les tendances intérieures du Grand Jeu. Alors qu’en même temps Breton et ma compréhension de sa praxis limitée à l’action continue de porter une sorte de fruit brûlant pour moi. J’ai l’impression que la longue synthèse de cette double approche est toujours en cours pour moi personnellement et pour le monde en général. Il s’agit d’une fission synthétique qui reste largement méconnue.

2. Vous êtes également un artiste visuel. Comment le visuel et le verbal interagissent-ils dans votre expérience ? En quoi les dessins de poètes comme Artaud, Lorca et Henri Michaux sont-ils différents ou similaires au travail d’artistes plasticiens qui ne sont pas des poètes ?



2. Il est intéressant que vous mentionniez Lorca. C’est son passage dans le milieu de l’expression visuelle qui a commencé d’alimenter ma tentative d’expression visuelle. A ce même propos, j’ai trouvé un livre des dessins de Miro et la combinaison a créé pour moi une fission, une électricité du possible qui était palpable et a inspiré mes premiers dessins au crayon. Ce qui a suivi a été la découverte du travail de Michaux et d’Artaud via ce médium, qui a donné une résonance supplémentaire à mes bulletins intérieurs qui étaient désormais éclos et étaient déjà en plein essor. Et bien sûr, la reconnaissance par Breton du modèle intérieur était à la hauteur de mon audition poétique car j’ai eu la chance de ne jamais passer par cette tribulation que reste le réalisme. Grâce à cette formation interne, je suis capable de regarder une œuvre abstraite sans nom de Byron Baker (mon camarade sur le plan artistique), d’y accéder instantanément et de la nommer. C’est comme un strabisme psychique à travers l’obscurité où l’exactitude verbale transparaît spontanément et un titre apparaît, qui enrichit mutuellement à la fois l’esprit intérieur et l’architecture spontanée du dessin à portée de main.

3. Êtes-vous visité par des êtres alchimiques, métaphysiques ou d’autres créatures intermédiaires similaires aux fées irlandaises ? Si oui, s’agit-il de visites amicales ? Diriez-vous que le poète est une sorte de chaman postmoderne ? Qu’en est-il des poètes comme Ezra Pound ou des futuristes italiens ?

3. En ce qui ùme concerne, la conscience poétique a été renforcée par une participation consciente aux états oniriques. Non que je me sois trouvé affaibli dans ces états et aie dû être guidé par des êtres reconnaissables mais par l’élévation de ma conscience intérieure lorsque j’expérimentais ces états. Il ne s’agissait pas d’une une réponse spectaculaire, comme si je me trouvais emporté par des oiseaux géants dans des régions inconnues de l’empyrée dans le cadre de ma pérégrination onirique, ni transporté vers des royaumes inconnus comme un Ibn Battuta invisible. Mon expérience dans ces états se manifeste par de subtils changements de conscience. Cela s’apparente au yoga du sommeil tibétain où, dans mon cas, une conscience transpire, et ce qui suit est la capacité linguale qui semble s’auto-transmuter et s’étendre non seulement via le subconscient mais aussi par son influence sur le conscient. Dans mon cas, il existe une autre composante qui a été explorée par ce que Sri Aurobindo entendait comme un champ verbal supra-conscient vertical ou largement inexploré. Pas une entrée verbale soudaine, mais une infiltration prolongée à la périphérie de ce niveau plutôt qu’une entrée précipitée criarde, quelque chose de moins spectaculaire qu’une ruée d’images qui découlent de l’ingestion de quelque chose qui ressemble à l’Ayahuasca ou peut-être d’une expérience soudaine semblable à la conversion de Saint-Paul sur la route de Damas. Je parle ici d’une amélioration subtile non pas en tant que sous-entendus langagier mais en tant qu’expansion subtile du pouvoir verbal qui ne peut pas être uniquement gouverné par l’esprit conscient avec ses paramètres. C’est pourquoi j’ai toujours compris que la quête du poète s’apparentait aux éléments subtils de la quête du chaman à la recherche d’un émerveillement supérieur. Une quête qui n’est pas sans rappeler les rayons qui émanent d’une réalisation verbale intérieure en expansion. Une quête certes non sans ombres et appréhensions mais une quête intérieure enrichie, où même ce que la conscience considère comme des erreurs ou des échecs s’ouvre sur un plan qui imprègne l’énergétique linguale magnétique.

Cet énergie d’être qui reste et qui se condense sous forme de pression lumineuse et transmute invisiblement le langage via une pression intérieure vivante. Encore une fois, cela reste le mélange de l’esprit conscient et subconscient avec les états supérieurs. Bien sûr, un tel exercice varie d’une personne à l’autre, mais ce qui est fondamental pour tous ceux qui expérimentent ce domaine reste l’infiltration linguale élargie non pas comme une provocation sonore mais comme un état d’esprit qui reste alchimique tout en transmettant ce que je comprends être une architecture de la plus grande précision. Si l’on passe à un autre problème paraphrasant largement Philip Lamantia et sa compréhension de Pound, il savait que Pound n’était pas sans rappeler une sorte de meuble lourd  dont l’ombre engloutit un vide sanitaire. Lorsqu’il parle de Camoens et d’autres sujets dans l’un de ses premiers essais, c’est irrésistiblement brillant. Mais ce qui contrebalance cet éclat, ce sont des exemples comme les contenus antisémites et ses coups de gueule sur Radio Rome. Il reste une figure déroutante qui n’est pas sans rappeler Marinetti qui a proposé et inspiré le contenu artistique du fascisme de Mussolini. Bien sûr, aucun des artistes ci-dessus n’était capable ni ne semblait avoir la capacité morale ou instinctive d’énoncer un remède verbal en restant silencieusement complice des conditions telles qu’elles persistaient dans des endroits comme le Congo ou le Mississippi. Malheureusement, des poètes tels que Pound et Marinetti avec leur obtusité morale et leur aveuglement, restent une partie intrinsèque du canon savant qui a infecté des générations de praticiens de la poésie. Il y a des années, Aldon Neilsen a écrit un livre (qui devait être intitulé Reading Race) où il examinait les lettres des modernistes et elles étaient traversées par des sentiments que tout ségrégationniste du Sud de l’époque aurait approuvé. En revanche, ce genre de fatigue n’a jamais rongé la province des premiers surréalistes lorsqu’ils ont dénoncé l’action coloniale française au milieu des années 1920 lors de la guerre du Rif en Afrique du Nord. C’est une forme de délicatesse que Pound et ses compagnons de voyage semblent n’avoir jamais pu incarner. Pour moi, le pouvoir du langage n’a jamais besoin d’être réduit à une telle idéologie raciale, mais il est toujours invoqué par le pouvoir intérieur comme un état de nettoyage psycho-émotionnel capable d’une irradiation prolongée.

4. Pouvez-vous nous dire comment vous avez survécu psychologiquement lorsque vous produisiez des œuvres mais ne publiiez pas encore ? Que diriez-vous aux jeunes poètes qui travaillent dans l’obscurité tout en vivant dans une culture qui leur dit qu’ils perdent leur temps ?

4. Je répondrai par le terme de sporulation psychique, un peu comme la survie à long terme des spores à travers une grande distance galactique. Je me suis toujours trouvé en écart vis à vis de la poésie qui épousait un grand mérite provincial, même quand cela  se produisait à Los Angeles, il me semblait que la poésie souffrait sous le voile d’une enclave provinciale toujours limitée par ses frontières intérieures, à son tour soutenue par d’autres qui restaient confinées à une géographie intérieure spécifique où la partie cesse de se mêler au tout. Au cours de ces périodes antérieures, je me sentais encerclé par une suffocation imaginative, qui dans un certain sens s’est étendue jusqu’à présent. Je me souviens d’avoir emporté un exemplaire de Eagle or Sun traduit par Eliot Weinberger, c’était comme un talisman qui repoussait les énergies quotidiennes indésirables qui tentaient de soumettre et de capturer mon imagination naissante via les détails oubliés du moment. Tous mes instants  ont été consacrés à nourrir mon imagination. Cela c’est passé tranquillement car il n’y avait pas de communauté principale où je pouvais alimenter cette intensité imaginative. C’est pendant cette période que j’ai fait mes premières incursions à San Francisco, et où j’ai rencontré Philip Lamantia. Cette rencontre m’a donné une étincelle qui a contribué à tout transfigurer  et elle ne m’a jamais abandonné. Son énergie, son lien direct avec Breton, que j’ai vécu comme verbalement authentique, ont créé pour moi une sorte d’éthique verbale, non pas une éthique statique rassurez-vous, mais une relation transmutable en fonction de l’instant. Par exemple, un mot peut s’annoncer intérieurement à votre conscience et peut modifier sa trajectoire quelques secondes ou quelques instants plus tard sans que l’esprit conscient n’interfère. J’appelle cet état une éthique de l’instantané. Ma vie intérieure était si active qu’elle m’a permis de me déplacer via la sporulation intérieure à travers une ère qui semble maintenant en permanence prolongée et obscurcie tandis qu’elle se poursuit dans les chroniques selon une déclinaison imaginative.

5. Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

5. Au cours des dernières années, j’ai travaillé au maintien en puissance accélérée. À l’heure actuelle, une demi-douzaine de publications sont dues. Je ne veux pas afficher ce qui pour certains serait une liste fastidieuse. Superficiellement, aucun des livres ne se ressemble. Tout d’abord, il y a le récent Colloque At The Abyss une conversation avec le poète Harold Abramowitz, puis ce qui viendra ensuite sera une partie de The Contortionist’s Whispers concernant l’exercice de la langue intérieure avec mon doppelganger poétique. C’est le premier de trois volumes condensés (vaguement inspirés par les livres de Michel Leiris intitulés, La Règle du jeu ) et il y a un autre volume simultané en cours en raison d’une collaboration avec le poète de la Côte Est Heller Levinson intitulé Dialogics, ainsi qu’une étude sur ce que je considère comme fondateur de la Renaissance du monde moderne. Le livre s’intitule Sur Dar el-Hikma, l’un des premiers centres avancés d’apprentissage fondé en 1004 par le calife al-Hakim et centré sur une vague d’apprentissage qui semble avoir été volontairement gaspillée et partiellement récupérée par l’Occident. Ensuite, il y a un volume de poésie de 600 pages intitulé The Combustion Cycle qui comprend divers états de chamanisme verbal allant d’un colibri au Pérou, à un chaman révolutionnaire en Angola, à la voix d’un Dailit transmuté en Inde. Il a été écrit vers le début du siècle actuel, mais il a fallu du temps pour lui trouver une place . Ensuite, il y a Refractive Africa due à  New Directions qui prend en compte la tornade qu’est l’Afrique. Cela prend en compte une méditation poétique sur Amos Tutuola, le pilier central du livre étant une méditation imaginative sur le Congo, et le livre se termine par un poème sur le fabuliste poétique malgache Jean-Joseph Rabearivello. Ensuite, il y a un livre de dessins à l’encre et au crayon à paraître chez Chax Press en Arizona. Parallèlement à ce qui précède, il reste un livre, caché, d’essais que j’ai accumulé pendant plus d’un an et intitulé Anterior Wattage. Et si cela ne suffisait pas, il y a un groupe de nouvelles pièces intitulé Trahison ín The Northern Theatre. Les choses se sont accumulées à un tel rythme que j’en suis venu à écrire en cessant de me suivre consciemment. Ensuite, il y a d’autres projets visuels et musicaux qui ne peuvent pas être mentionnés pour le moment. En termes simples, je vais partout où l’énergie me mène pendant une période donnée. À ce stade, tout catalogue linéaire de cette énergie s’annulerait à la première précipitation.

6. Que pensez-vous de la poésie américaine des dix dernières années ?

6. Je ne peux pas faire une évaluation définitive du paysage poétique générique. Je sais qu’au cours de la dernière décennie  certains de mes associés tels que Heller Levinson, Carlos Lara, Janice Lee, Nathaniel Mackey, Andrew Joron, Tongo Eisen-Martin, Marcella Durand, Ivan Arguelles, Anthony Seidman, Brenda Ijima, feu Ron Allen et Adam Cornford ont réalisé un travail remarquable. Bien sûr, ce n’est pas là une liste démotique, que je serais incapable de faire. La notion de concours, de compétitions et de notoriété mène à des embûches et à une déstabilisation de l’imaginaire qui place l’œuvre dans le contexte érodant du moment. Je pense que le travail poétique doit s’inscrire comme une sismologie invisible qui capte les courants de l’atmosphère intellectuelle, juste pour paraphraser Lautréamont. Encore une fois, pour paraphraser Henry Miller, le déclin peut être un grand stimulant pour l’écrivain. Ce que la civilisation planétaire actuelle paraît émettre ne semble rien d’autre qu’un déclin précipité signalé, par de nombreux groupes et experts qui écrivent toujours sur le présent en tant qu’annexe cacophonique. Je pense que la meilleure chose pour l’écrivain est de se concentrer sur l’écriture et de laisser les créateurs de paradigmes s’épanouir via leurs abstractions intellectuelles  et monétaires.

7. Il semble que vous n’ayez jamais rejoint un groupe surréaliste organisé à l’intérieur ou à l’extérieur des États-Unis. Pourquoi donc?

7. Rejoindre un groupe a toujours été pour moi comme se fondre dans un récit préexistant. Quelque chose comme de  l’énergie qui paraît emmurée dans l’expérience antérieure. Un confinement curieux semble se produire, et parce que certains sauts de pensée ne peuvent jamais se produire pleinement au-delà de sa grammaire fixe, la pensée de groupe a tendance à vivre de la revente de l’énergie des jeunes pousses individuelles. Ses périodes de croissance capricieuse semblent parfois altérer le mandat consensuel et provoquer des frictions inutiles. Et donc, les possibilités restent restreintes. De sorte que l’énergie originelle recherchée ne peut jamais être médicalement réalisée. L’énergie est alimentée par la dissonance qui modifie le récit habituel. Cette altération semblait la clé d’une des dernières lettres d’Artaud à Breton. Une particule verbale de lui me revient, concernant le fait que le corps a la capacité d’invoquer sa propre « révolution électrique ». Ces deux mots combinés évoquaient pour moi le besoin de rechercher la piste intérieure de ses chiffres brûlants, qui psalmodiaient les rebellions comme par magie. Il semble que l’on doive dynamiser les premières tentatives de travail sur l’auto-définition, vers une autonomisation des tendances de l’artisanat verbal personnel afin de faire surgir la maturité verbale. Toute forme d’auto-idéologie porte atteinte à ce processus. La clé est ici le désir de regarder vers l’intérieur pour ne pas se laisser influencer par les tendances du moment. Comme Lorca l’a dit un jour, pas « maintenant maintenant maintenant », mais il a compris qu’il s’agissait d’une durabilité verbale à long terme. Pourtant, l’aspect négatif de cette pérennité reste un isolement curieux par rapport à la protection fournie par le groupe qui permet d’absorber les coups personnels des rationalistes à un moment sensible de son développement. On se retrouve pris au carrefour entre l’expérimentation intérieure et l’isolement momentané du groupe qui protège poétiquement de la psychologie issue de la rhétorique des marchés de capitaux. Pour moi, l’évolution de la grammaire poétique organique n’est pas sans rappeler le fait de vivre sa réalité sur le fil du rasoir qui crée des ravages dans son royaume psycho-physique. Cette expérience assimile l’expérience à la compréhension de Rimbaud de la résistance à l’épreuve du poète consistant à résister à la désorganisation organique. Cela reste particulièrement difficile dans une société pleine de rhétorique superficielle qui exige une posture transactionnelle vis-à-vis du langage. Cette posture n’étant autre qu’une idéologie tacite de la procédure pas à pas. Parfois, cela reste une expérience opaque et qui embrouille pour le poète parce que l’on est obligé de transmettre des restes verbaux quotidiens avec des amis et des connaissances qui se rangent du côté de cette prudence qu’est le pragmatisme et qui tend à favoriser ce qui a été collectivement toléré. Ce n’est pas sans rappeler la ferveur poétique de Sor Juana lorsqu’elle est entourée de toutes parts par les conventions infligées par le couvent. Pour moi, j’étais entouré d’une inhibition verbale de l’imagination qui s’était infiltrée dans l’enclave connue sous le nom de South-Central Los Angeles. Ayant eu la chance d’avoir une certaine exposition dans les rues de North Philly et South Side Chicago, toutes ces communautés semblent former un ensemble en ce qu’elles se ressemblent intérieurement. Toutes ces régions regorgent de curieuses clarifications par déficit, mais des exceptions telles qu’Eric Dolphy et Sun Ra sont nées de ce déficit permanent en transmutant ce déficit de manière créative. Toute sa pratique en tant que poète consiste à transmuter lingualement les déficits que l’atmosphère semble assurer, en créant une autre échelle ou une autre portée vers lesquelles évolueront les tendances de l’imagination qui ne se sont pas encore allumées.

8. En tant que poète égyptien (Mohsen), il est important pour moi de savoir comment vous considérez la civilisation égyptienne antique,

Je sais que vous vous intéressez à l’alchimie égyptienne, aux arts magiques, aux développements intellectuels et autres développements artistiques,

Pouvez-vous préciser ces intérêts ?

8. Lorsque l’on commence l’étude des textes de philosophie avec des fragments des présocratiques, on ferme les yeux sur une première erreur… Ce qui entretient en retour une trépidation  dans la pensée collective. La compréhension de Schwaller de Lubicz, c’était que la racine de la civilisation actuelle n’avait pas été engendrée en Grèce mais dans l’Égypte phraonique via les sept premières dynasties de son édifice pyramidal. L’Egypte n’était pas seulement définie par sa magie pyramidale mais par des capacités particulières de l’esprit. Je fais souvent remarquer que Plutarque a nommé les enseignants égyptiens qui furent essentiels dans l’enseignement de gens tels que “Solon, Thalès, Platon, Eudoxe, Pythagore”. Il précise que Pythagore a été instruit par Oenuphis d’Héliopolis. Cela dit, il faut se rappeler que les premiers constructeurs africains étaient nubiens et que les premières grandes dynasties de la construction pyramidale égyptienne étaient africaines. L’essentiel de la confusion sur ce point provient de l’égyptologie coloniale récente du 20e siècle. Ces érudits tentent d’une manière ou d’une autre de suggérer qu’un élément venu du Nord ou Européen a favorisé la psychologie mathématique de ces structures destinées à rester éternellement debout. Il suffit de regarder la datation de la Grèce et celle de l’Égypte pour avoir une bonne perspective aux auteurs organiques des pyramides. Non pas qu’il faille chercher une première africaine sur la seule base d’un héritage, mais bien plutôt en tant que norme évolutive pour la conscience sur cette planète. Ce n’est pas que je me sois approché de la maîtrise égyptienne du détail qui engloutit maintenant le champ psychique (qu’il soit officiellement reconnu ou non), mais je continue à m’engager avec sa résonance psychologique trempée comme elle l’est dans mon enregistrement cinétique courant. Un enregistrement qui est  endémique à ma résonance poétique, une résonance qui est en contradistinction organique avec ce qui aimante la recherche de l’érudit et du savant  Je pense qu’il est possible d’absorber poétiquement le détail de telle manière que le détail s’élargisse et vienne se couler dans la vision, consumée par une malléabilité endémique qui n’est pas sans rappeler celle du verre lorsqu’il sort du four. Je ne parle pas ici d’inexactitude générique mais de l’essence du détail tel qu’il se coule dans la conscience vivante qui émerge donc avec une force transmutée. Ce qui est différent du savant qui isole le détail original et le convoque dans un état moribond privé de son imaginaire implicite. Dans un tel état, l’Egypte ancienne ne conserve jamais une électricité existentielle, une énergie vivante telle que je puisse être poétiquement sondé par une vigueur fraîche et débridée. Pour moi, l’Égypte n’est pas une rhétorique secondaire ou étrange sur laquelle se pencher avec le calme qu’excuse la possession savante, une possession que je comprends comme une progression dans le sens d’une sagacité rationnelle. La manière dont j’absorbe cette sagacité est plus proche de l’esprit vers lequel nous a ouvert  Sun Ra quand il s’épanouissait soniquement dans les domaines de ce que nous appelons le cerveau droit. Dans l’état actuel des choses, il est convenu que le cerveau droit atténue les détails, mais au contraire, il absorbe les détails à un degré tel qu’ils coulent, si bien qu’il reste ouvert à la transmutation existentielle en restant en résonance avec le présent. En tant qu’être créatif, je ne suis pas enclin à la représentation démotique de listes rachitiques issues d’un emmurement antérieur. Pour moi, la connaissance doit être restaurée via ses fragments vivants plutôt que de reprendre les choses intégralement à partir d’un contexte antérieur. Les Maures ont utilisé ce principe quant à l’invention grecque pour faire évoluer ces inventions au-delà de leurs anciens habitats et pour qu’une nouvelle osmose soit rendue possible. Pour moi, la gamme mentale avancée en Egypte se situe à une échelle à laquelle aspire l’esprit actuel.

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